Diego Velasquez, Démocrite, usée des beaux-arts de Rouen
Une question taraude l’ensemble des Corses qui disposent d’un quelconque levier pour agir - sans délai - et espérer rendre habitable notre portion de terre. Comment la Corse peut-elle agir face aux transformations sans précédent qui touchent la planète ? Assurément peu de chose au niveau global, au-delà d’une contribution morale, mais beaucoup pour orienter dans le bon sens nos milieux de vie. Jusqu’aux années 1990, il était possible nous dit Latour « d’associer l’horizon de la modernisation aux notions de progrès, d’émancipation, de richesse, de confort, de luxe..." En Corse, la modernisation a pris les traits des régions de la marge, jouant son avenir à partir de la double rente de l’emploi public et du tourisme.
Avec ce que Latour nomme le « nouveau régime climatique », il ne s’agit plus de petites fluctuations climatiques mais de bouleversements qui mobilisent le système terre lui-même. En réaction à la modernisation, à l’extraction des ressources, au culte de la propriété, à l’accaparement des terres, aux violences sans précédent faites au vivant, la terre résiste, se rebelle, fait entendre de nouvelles voix jusqu’ici muettes, « un autre territoire s’est mis à remuer, à trembler à s’émouvoir. Le meilleur des mondes est devenu le pire. Ou bien nous nions l’existence du problème ou bien nous cherchons à atterrir ? Comment trouver un sol habitable ? »
En Corse comme ailleurs nous sommes pris entre deux injonctions contradictoires, se mouvoir « en avant vers l’idéal de progrès, en arrière vers le retour aux certitudes anciennes ».
Avec ce que Latour nomme le « nouveau régime climatique », il ne s’agit plus de petites fluctuations climatiques mais de bouleversements qui mobilisent le système terre lui-même. En réaction à la modernisation, à l’extraction des ressources, au culte de la propriété, à l’accaparement des terres, aux violences sans précédent faites au vivant, la terre résiste, se rebelle, fait entendre de nouvelles voix jusqu’ici muettes, « un autre territoire s’est mis à remuer, à trembler à s’émouvoir. Le meilleur des mondes est devenu le pire. Ou bien nous nions l’existence du problème ou bien nous cherchons à atterrir ? Comment trouver un sol habitable ? »
En Corse comme ailleurs nous sommes pris entre deux injonctions contradictoires, se mouvoir « en avant vers l’idéal de progrès, en arrière vers le retour aux certitudes anciennes ».
Redevenir matérialistes
Où atterrir ? renvoie dos à dos deux mauvaises réponses à la crise : le choix du refuge au sein du territoire frontière, d’une identité essentialisée et sans ressort ou la fuite en avant sur le "front de modernisation" de l’ancien monde pourtant violemment rappelé « par les forces réactives de la planète ».
Ces deux attracteurs qui mènent le monde depuis la révolution industrielle clivent des positions qui ne permettent pas de répondre aux nouveaux défis. Le global comme le local ont perdu avec la modernisation toute consistance, toute matérialité. De là, aucune prise n’est possible pour s’engager dans une direction susceptible de répondre à la crise planétaire.
Pour Latour, la crise est le fruit de la conjonction historique des pouvoirs de la science et d’une certaine idéologie du progrès issus de la modernité. La terre est ainsi devenue trop petite pour subvenir aux exigences de modèles de production conçus pour une exploitation sans limite des ressources (ne faut-il pas, dit-on, l'équivalent de 6 à 8 planètes pour assurer le train de vie d'un citoyen américain ?) et trop grande lorsqu’elle est saisie depuis la conception et les instruments des « sciences modernes ». Car la science a adopté principalement une vision mécaniste fondée sur un travail continu d’épuration de ses objets de recherche. L’action humaine et pendant longtemps les vivants eux-mêmes, ont été écarté de ses modèles de compréhension du réel. Elle a ainsi fourni les fondements à une philosophie du progrès qui ignore les conditions de vie. Latour dégage deux conceptions de la nature : celle antique avec son sens originel de processus, d’engendrement (la phusis grecque et la natura latine) et celle définie par "l’objectivation depuis Sirius" qui frappe de suspicion tout savoir issu de l’expérience. La nature-engendrement apparait "trop active, trop complexe pour rester contenue dans les frontières étroites et limités de quelques localités que ce soit" alors que la "nature-univers" ne privilégie "qu’un seul type de mouvement" et empêche de considérer toute la complexité. Voilà les raisons pour lesquelles nous sommes selon L'auteur "tous débordés deux fois : par le trop grand comme par le trop petit".
Latour appelle à repenser la matérialité du monde, en l’associant à la construction des territoires, « pour être matérialiste, il faut une matière, pour occuper un territoire il faut une terre !" . La réduction des ressources à des facteurs de production a conduit à simplifier nos modes d’existence. Ainsi, « Devenir matérialiste ce n’est plus forcément réduire le monde à des objets mais étendre la liste de mouvements à prendre en compte. »
L’affaiblissement de la matérialité, la réduction de son étendue, tient paradoxalement à la toute-puissance d’une science dépourvue... de matérialité et de réalisme. Une science ambitionnant d’atteindre une objectivité universelle - au risque d’adopter le point de vue de nulle part - ne permet pas de corriger la trajectoire mortifère dans laquelle est prise l’ensemble du vivant.
Il s’agit de "redonner de la force aux mots objectifs, efficaces ou rationnels" bref de retrouver la science telle qu’elle nous permettrait de comprendre ce qui se passe sur Terre.
Le projet de la science consolidée par le progrès a conduit à retirer sa "sensibilité à la nature, ainsi est née la nature-univers supposée s'étendre depuis les cellules de notre corps jusqu’au galaxies les plus lointaines."
Ces deux attracteurs qui mènent le monde depuis la révolution industrielle clivent des positions qui ne permettent pas de répondre aux nouveaux défis. Le global comme le local ont perdu avec la modernisation toute consistance, toute matérialité. De là, aucune prise n’est possible pour s’engager dans une direction susceptible de répondre à la crise planétaire.
Pour Latour, la crise est le fruit de la conjonction historique des pouvoirs de la science et d’une certaine idéologie du progrès issus de la modernité. La terre est ainsi devenue trop petite pour subvenir aux exigences de modèles de production conçus pour une exploitation sans limite des ressources (ne faut-il pas, dit-on, l'équivalent de 6 à 8 planètes pour assurer le train de vie d'un citoyen américain ?) et trop grande lorsqu’elle est saisie depuis la conception et les instruments des « sciences modernes ». Car la science a adopté principalement une vision mécaniste fondée sur un travail continu d’épuration de ses objets de recherche. L’action humaine et pendant longtemps les vivants eux-mêmes, ont été écarté de ses modèles de compréhension du réel. Elle a ainsi fourni les fondements à une philosophie du progrès qui ignore les conditions de vie. Latour dégage deux conceptions de la nature : celle antique avec son sens originel de processus, d’engendrement (la phusis grecque et la natura latine) et celle définie par "l’objectivation depuis Sirius" qui frappe de suspicion tout savoir issu de l’expérience. La nature-engendrement apparait "trop active, trop complexe pour rester contenue dans les frontières étroites et limités de quelques localités que ce soit" alors que la "nature-univers" ne privilégie "qu’un seul type de mouvement" et empêche de considérer toute la complexité. Voilà les raisons pour lesquelles nous sommes selon L'auteur "tous débordés deux fois : par le trop grand comme par le trop petit".
Latour appelle à repenser la matérialité du monde, en l’associant à la construction des territoires, « pour être matérialiste, il faut une matière, pour occuper un territoire il faut une terre !" . La réduction des ressources à des facteurs de production a conduit à simplifier nos modes d’existence. Ainsi, « Devenir matérialiste ce n’est plus forcément réduire le monde à des objets mais étendre la liste de mouvements à prendre en compte. »
L’affaiblissement de la matérialité, la réduction de son étendue, tient paradoxalement à la toute-puissance d’une science dépourvue... de matérialité et de réalisme. Une science ambitionnant d’atteindre une objectivité universelle - au risque d’adopter le point de vue de nulle part - ne permet pas de corriger la trajectoire mortifère dans laquelle est prise l’ensemble du vivant.
Il s’agit de "redonner de la force aux mots objectifs, efficaces ou rationnels" bref de retrouver la science telle qu’elle nous permettrait de comprendre ce qui se passe sur Terre.
Le projet de la science consolidée par le progrès a conduit à retirer sa "sensibilité à la nature, ainsi est née la nature-univers supposée s'étendre depuis les cellules de notre corps jusqu’au galaxies les plus lointaines."
Le terrestre
Mais Latour est également fin sociologue lorsqu’il entreprend de prendre en charge la difficile question de la prise de conscience de nos contemporains face à la plus grande crise qu’ait jamais connu l’humanité.
Il propose d’adopter un nouveau point de vue, un nouveau "front de la modernité", un nouvel attracteur occupant une tierce place vis-à-vis du local et du global. Il établit ce nouveau pôle d’attraction à partir de ce qu’il nomme "le terrestre". Etrange notion qui nous apparaît à la fois triviale - ne sommes-nous pas des terriens ? Et peu précise, fait-il référence aux sciences de la terre ? Il le présente comme un monde qu’il nous appartient d’inventer où l’esprit moderne doit "apprendre à cohabiter avec ceux qu’il prenait jusqu’ici pour archaïque."
Cela suppose de "reprendre la question sociale mais en l’intensifiant par la nouvelle géopolitique." Le social dialoguant avec le social présente pour l’auteur les mêmes insuffisances que la nature raisonnée à partir des choses de la nature. « Si nous voulons défendre nos appartenances, il va nous falloir identifier aussi ces migrations sans forme ni nations qu’on appelle climat, érosion, pollution, épuisement des ressources, destruction des habitats ».
L’enjeu n’est rien moins que la constitution de nouveaux collectifs qui assemblent toutes les entités nécessaires à notre vie sur terre. Par collectif, il faut comprendre le travail de collecte, de composition, de rassemblement d’humains et de non-humains qui comptent pour notre subsistance. Car loin d’être inerte, comme la science l’a longtemps laissé penser, la terre est faite d’interdépendances inextricables lesquelles constituent la trame de nos existences. Les autres terrestres sont devenus "récalcitrants". Ils exigent d’être pris en compte, d’être comptés, et par là même, que l’on se défasse de cette pensée moderne qui croyait pouvoir séparer monde naturel et monde humain.
Appartenir
L’entreprise, collective s’il en est, suppose de repolitiser l’appartenance à un sol en associant tous ceux en recherche d’ancrage. Ceux de l’intérieur, déliés de la matérialité du terrestre, et ceux de l’extérieur migrants de l’infortune, arrachés de leur terrain de vie. Latour fortifie une idée pas toujours entendue depuis Paris. « Appartenir à un sol, vouloir y rester, maintenir le soin d’une terre, s’y attacher n’est devenu réactionnaire que par contraste avec la fuite en avant imposée par la modernisation. Rien de plus créateur, d’innovant, de technique, de contemporain que de négocier l’atterrissage à un sol ».
En définitive, Latour ouvre la voie à une nouvelle écologie dont le nom semble aujourd’hui usé par une excessive naturalisation du terrestre. Car, le défaut de matérialité s’explique par le rôle que les progressistes de gauche et les modernistes de droite ont donné à la nature en désactivant le vivant de sa capacité d’agir, en les positionnant à l’extérieur de la société « prisonnier d’une conception de la nature, impossible à politiser puisqu’elle a été justement inventée pour limiter l’action humaine grâce à l’appel aux Lois de la nature ». Dans son essai, tout appelle à une « écologie territoriale » qui reprendrait à la fois son ancrage matériel tout en regagnant une force politique et le devant de la scène, « l’évènement massif qu’il s’agit d’encaisser concerne la puissance d’agir de ce terrestre qui n’est plus le décor, l’arrière scène, de l’action des humains ».
Le projet de redonner consistance au territoire est indéfectible du projet de redonner confiance en la science et à la politique. "Pour rassurer, il faudrait être capable de réussir deux mouvements complémentaires, s’attacher à un sol d’une part, se mondialiser de l’autre". Et en tout premier lieu, déculpabiliser l’attachement au territoire : « chacun de nous est prêt à s’extirper de son lopin de terre mais sûrement pas pour se voir imposer la vision étriquée d’un autre lopin de terre simplement éloigné."
Il propose d’adopter un nouveau point de vue, un nouveau "front de la modernité", un nouvel attracteur occupant une tierce place vis-à-vis du local et du global. Il établit ce nouveau pôle d’attraction à partir de ce qu’il nomme "le terrestre". Etrange notion qui nous apparaît à la fois triviale - ne sommes-nous pas des terriens ? Et peu précise, fait-il référence aux sciences de la terre ? Il le présente comme un monde qu’il nous appartient d’inventer où l’esprit moderne doit "apprendre à cohabiter avec ceux qu’il prenait jusqu’ici pour archaïque."
Cela suppose de "reprendre la question sociale mais en l’intensifiant par la nouvelle géopolitique." Le social dialoguant avec le social présente pour l’auteur les mêmes insuffisances que la nature raisonnée à partir des choses de la nature. « Si nous voulons défendre nos appartenances, il va nous falloir identifier aussi ces migrations sans forme ni nations qu’on appelle climat, érosion, pollution, épuisement des ressources, destruction des habitats ».
L’enjeu n’est rien moins que la constitution de nouveaux collectifs qui assemblent toutes les entités nécessaires à notre vie sur terre. Par collectif, il faut comprendre le travail de collecte, de composition, de rassemblement d’humains et de non-humains qui comptent pour notre subsistance. Car loin d’être inerte, comme la science l’a longtemps laissé penser, la terre est faite d’interdépendances inextricables lesquelles constituent la trame de nos existences. Les autres terrestres sont devenus "récalcitrants". Ils exigent d’être pris en compte, d’être comptés, et par là même, que l’on se défasse de cette pensée moderne qui croyait pouvoir séparer monde naturel et monde humain.
Appartenir
L’entreprise, collective s’il en est, suppose de repolitiser l’appartenance à un sol en associant tous ceux en recherche d’ancrage. Ceux de l’intérieur, déliés de la matérialité du terrestre, et ceux de l’extérieur migrants de l’infortune, arrachés de leur terrain de vie. Latour fortifie une idée pas toujours entendue depuis Paris. « Appartenir à un sol, vouloir y rester, maintenir le soin d’une terre, s’y attacher n’est devenu réactionnaire que par contraste avec la fuite en avant imposée par la modernisation. Rien de plus créateur, d’innovant, de technique, de contemporain que de négocier l’atterrissage à un sol ».
En définitive, Latour ouvre la voie à une nouvelle écologie dont le nom semble aujourd’hui usé par une excessive naturalisation du terrestre. Car, le défaut de matérialité s’explique par le rôle que les progressistes de gauche et les modernistes de droite ont donné à la nature en désactivant le vivant de sa capacité d’agir, en les positionnant à l’extérieur de la société « prisonnier d’une conception de la nature, impossible à politiser puisqu’elle a été justement inventée pour limiter l’action humaine grâce à l’appel aux Lois de la nature ». Dans son essai, tout appelle à une « écologie territoriale » qui reprendrait à la fois son ancrage matériel tout en regagnant une force politique et le devant de la scène, « l’évènement massif qu’il s’agit d’encaisser concerne la puissance d’agir de ce terrestre qui n’est plus le décor, l’arrière scène, de l’action des humains ».
Le projet de redonner consistance au territoire est indéfectible du projet de redonner confiance en la science et à la politique. "Pour rassurer, il faudrait être capable de réussir deux mouvements complémentaires, s’attacher à un sol d’une part, se mondialiser de l’autre". Et en tout premier lieu, déculpabiliser l’attachement au territoire : « chacun de nous est prêt à s’extirper de son lopin de terre mais sûrement pas pour se voir imposer la vision étriquée d’un autre lopin de terre simplement éloigné."
Prises pour agir
Il convient ensuite de rendre visibles les prises pour l’action du quotidien jusqu’à l’engagement citoyen de plus longue portée. Le désintérêt citoyen et le rejet des choses terrestres ne croissent pas seulement en raison d’un déficit de conscience mais plus surement par l’absence de prises concrètes. Pour réengager la Corse dans les affaires humaines, Latour offre une métaprise, celle déjà délimitée par les sciences géophysiques : reprendre intérêt pour la terre commande d’abandonner le point de vue de Sirius et de resserrer notre zone de concernement à la stricte définition de nos terrains de vie, à la "zone critique", cette minuscule zone de quelques kilomètres entre l’atmosphère et la roche mère. "En recentrant les sciences sur cette zone de façon à ne pas s’encombrer de tout l’univers chaque fois que l’on cherche à traiter les affaires du terrestre. De là s’ouvre selon lui une nouvelle époque de grandes découvertes mais celles-ci ne ressemblent pas à la conquête d’un nouveau monde vidé de ses habitants mais à l’enfouissement dans la Terre aux milles plis".
La ligne de partage entre les sciences de la nature-processus et les sciences de la nature-univers pose les termes de passage entre "une analyse en termes de système de production et une analyse en termes de systèmes d’engendrement ». L’intérêt de penser la coexistence entre ces deux approches qui ne procèdent pas de la même conception de la matérialité est salutaire. Elle offre un espace à la quête inextinguible et proprement humaine d’une « position surplombante » et elle répond à l’urgence de la préservation de nos terrains de vie, celle "mettant aux prises des agents, des acteurs, des animés qui ont tous des capacités de réactions distinctes. Et ainsi, engendrer des terrestres plutôt que de produire des ressources pour les seuls humains."
La ligne de partage entre les sciences de la nature-processus et les sciences de la nature-univers pose les termes de passage entre "une analyse en termes de système de production et une analyse en termes de systèmes d’engendrement ». L’intérêt de penser la coexistence entre ces deux approches qui ne procèdent pas de la même conception de la matérialité est salutaire. Elle offre un espace à la quête inextinguible et proprement humaine d’une « position surplombante » et elle répond à l’urgence de la préservation de nos terrains de vie, celle "mettant aux prises des agents, des acteurs, des animés qui ont tous des capacités de réactions distinctes. Et ainsi, engendrer des terrestres plutôt que de produire des ressources pour les seuls humains."
Nouvelle citoyenneté, nouvelle politique
La lecture de Où atterrir ? contient également un intérêt méthodologique. L’enquête sur le vivant n’est plus la seule affaire des spécialistes de la nature, écologues et écologistes si peu entendus. Elle permet d’enrôler les habitants en leur redonnant la possibilité d’accéder à une nouvelle citoyenneté devenue consciente de ses interdépendances avec le terrestre. Les bonnes questions à poser deviennent :"A quoi tenez-vous le plus ? Qui dépend de vous pour sa subsistance ? Contre qui allez-vous devoir lutter ? Comment hiérarchiser l’importance de tous ces agents ?" Des questions dont on peut s’étonner qu’elles soient si peu posées et finalement si peu comprises des citoyens eux-mêmes.
Que faire ? Décrire ! Pas de politique sérieuse sans un travail minutieux d’inventaire de ce qui compte. « Mesurer, animé par animé, tête de pipe après tête de pipe, de quoi se compose le terrestre pour nous. Il s’agit de définir les terrains de vie ; ce dont un terrestre dépend pour sa survie et en se demandant quels sont les autres terrestres qui se trouvent dans sa dépendance. »
Dans un système d’engendrement (celui de la nature antique), la transmission, souvent réduite à l’utilitarisme de la formation dans le système de production, reprend sa place au cœur de la transformation. "La perversité du front de modernisation c’est qu’en ridiculisant la notion de tradition comme quelque chose d’archaïque, il a rendu impossible toute forme d’héritage."
Pour l’heure, la Corse semble peu concernée par l’urgence climatique ; du moins la question ne donne pas consistance à un programme politique endogène et radical (du point de vue du vivant). Pourtant, il va nous falloir atterrir et le plus tôt sera le mieux. Loin de céder à une écologie de la nature, faite de bonnes résolutions choisies sur catalogue (et bordées de bonnes intentions), Latour place au centre du jeu la territorialité. Pour réussir l’atterrissage, forcé et sans pilote, il nous faut abandonner les anciens marqueurs de droite et de gauche devenus obsolètes pour cartographier la diversité de nos territoires. Refaire de la politique à nouveaux frais, et si possible en gardant les pieds sur terre, suppose de redonner consistance et matérialité à nos manières d’habiter notre île par la recherche d'une autonomie effective. « Est-ce que nous continuons à nourrir des rêves d’escapade ou est-ce que nous nous mettons en route pour chercher un territoire habitable pour nous et pour nos enfants ?».
Que faire ? Décrire ! Pas de politique sérieuse sans un travail minutieux d’inventaire de ce qui compte. « Mesurer, animé par animé, tête de pipe après tête de pipe, de quoi se compose le terrestre pour nous. Il s’agit de définir les terrains de vie ; ce dont un terrestre dépend pour sa survie et en se demandant quels sont les autres terrestres qui se trouvent dans sa dépendance. »
Dans un système d’engendrement (celui de la nature antique), la transmission, souvent réduite à l’utilitarisme de la formation dans le système de production, reprend sa place au cœur de la transformation. "La perversité du front de modernisation c’est qu’en ridiculisant la notion de tradition comme quelque chose d’archaïque, il a rendu impossible toute forme d’héritage."
Pour l’heure, la Corse semble peu concernée par l’urgence climatique ; du moins la question ne donne pas consistance à un programme politique endogène et radical (du point de vue du vivant). Pourtant, il va nous falloir atterrir et le plus tôt sera le mieux. Loin de céder à une écologie de la nature, faite de bonnes résolutions choisies sur catalogue (et bordées de bonnes intentions), Latour place au centre du jeu la territorialité. Pour réussir l’atterrissage, forcé et sans pilote, il nous faut abandonner les anciens marqueurs de droite et de gauche devenus obsolètes pour cartographier la diversité de nos territoires. Refaire de la politique à nouveaux frais, et si possible en gardant les pieds sur terre, suppose de redonner consistance et matérialité à nos manières d’habiter notre île par la recherche d'une autonomie effective. « Est-ce que nous continuons à nourrir des rêves d’escapade ou est-ce que nous nous mettons en route pour chercher un territoire habitable pour nous et pour nos enfants ?».