Nous ne faisons pas quʼhabiter un territoire, il nous habite également et nourrit une part dʼintime en chacun de nous, au plus profond.
Le paysage et la nature sont mes obsessions. Ils incarnent un tout, matériel et immatériel, chargé dʼhistoire et de mystères. La terre renvoie aux éléments primordiaux : même s’ils se sont transformés avec nous, ces espaces se sont créés sans nous. Dans un monde où le consommable a pris le pas sur le contemplatif, nous ne prenons plus le temps de nous y attarder pour en saisir, au-delà de la beauté ou de la grandeur, la part de fragilité et leur mise en sursis.
Lorsque je marche, quel que soit le lieu, il me semble arpenter une cartographie émotionnelle où résonnent mes propres intériorités.
La montagne a quelque chose de sacré pour beaucoup dʼentre nous ici, pas seulement pour ce quʼelle a pu être et ce quʼelle représente encore dans notre patrimoine et notre culture agro-pastorale. Au-delà dʼun certain seuil, elle semble être restée inchangée, vierge, même si elle est de plus en plus convoitée. Tout là-haut, dans ces territoires minéraux parfois très austères et baignés de silence, nous savons que nous ne sommes pas tout à fait à notre place. Des forces inconnues nous dépassent, nous renvoient à nos limites.
Toute marche, toute ascension me conduit à une forme de dépouillement. Pour citer René Daumal dans le Mont Analogue, je crois que « chaque homme vivant a dans la montagne son «homme-creux», comme lʼépée a son fourreau, comme le pied a son empreinte, et à la mort ils se rejoignent ».
Pour moi, les paysages et les reliefs forment un corps vivant, statique et mouvant à la fois. La création du monde s’y rejoue et les regarder, cʼest peut-être une manière de retrouver la « matrice ».
Puis dans ce corps vivant, dans ce territoire traversé de toute part, il y a lʼanimal. Il est à la fois ce que nous sommes et ce dont nous nous sommes éloignés. Il est tantôt cet entre-deux qui témoigne dʼun basculement vers la sauvagerie et la liberté totale, tantôt lʼêtre errant que nous sommes et au travers duquel nous projetons notre propre condition. Il habite le monde autant que nous, même sʼil joue une autre partition.
Le paysage et la nature sont mes obsessions. Ils incarnent un tout, matériel et immatériel, chargé dʼhistoire et de mystères. La terre renvoie aux éléments primordiaux : même s’ils se sont transformés avec nous, ces espaces se sont créés sans nous. Dans un monde où le consommable a pris le pas sur le contemplatif, nous ne prenons plus le temps de nous y attarder pour en saisir, au-delà de la beauté ou de la grandeur, la part de fragilité et leur mise en sursis.
Lorsque je marche, quel que soit le lieu, il me semble arpenter une cartographie émotionnelle où résonnent mes propres intériorités.
La montagne a quelque chose de sacré pour beaucoup dʼentre nous ici, pas seulement pour ce quʼelle a pu être et ce quʼelle représente encore dans notre patrimoine et notre culture agro-pastorale. Au-delà dʼun certain seuil, elle semble être restée inchangée, vierge, même si elle est de plus en plus convoitée. Tout là-haut, dans ces territoires minéraux parfois très austères et baignés de silence, nous savons que nous ne sommes pas tout à fait à notre place. Des forces inconnues nous dépassent, nous renvoient à nos limites.
Toute marche, toute ascension me conduit à une forme de dépouillement. Pour citer René Daumal dans le Mont Analogue, je crois que « chaque homme vivant a dans la montagne son «homme-creux», comme lʼépée a son fourreau, comme le pied a son empreinte, et à la mort ils se rejoignent ».
Pour moi, les paysages et les reliefs forment un corps vivant, statique et mouvant à la fois. La création du monde s’y rejoue et les regarder, cʼest peut-être une manière de retrouver la « matrice ».
Puis dans ce corps vivant, dans ce territoire traversé de toute part, il y a lʼanimal. Il est à la fois ce que nous sommes et ce dont nous nous sommes éloignés. Il est tantôt cet entre-deux qui témoigne dʼun basculement vers la sauvagerie et la liberté totale, tantôt lʼêtre errant que nous sommes et au travers duquel nous projetons notre propre condition. Il habite le monde autant que nous, même sʼil joue une autre partition.
Photographier, Sacraliser
Ma production dʼimages nʼest jamais calculée, elle résulte dʼexpériences personnelles et de ce rapport intime avec lʼespace. Bien sûr, la photographie nʼest pas la réalité, elle extrait un fragment et ouvre le champ des possibles. Au fil de pérégrinations, je partage des histoires et des symboles dans lesquels chacun peut tenter de (re)trouver quelque chose qui lui est propre. Cela peut être quelque chose de très fugace, de très sensitif.
Il y a peut-être une part psychanalytique dans cette démarche, mais je ne fais pas dʼimage pour l’image ni pour plaire ; elle sʼimpose par une narration intérieure au sein du territoire. Chaque image est un poème, et chaque texte, lorsque j’en ajoute est une image ; un dialogue peut sʼinstaller, comme une tentative de réappropriation de lʼinstant et du monde, comme toujours.
Dans ma démarche photographique, il y a je crois une forme de sacralisation de quelque chose, lʼintention et lʼacte en eux-mêmes en témoignent.
Saisir, décrire, vivre une émotion forte, la traduire, cʼest lʼextraire et lʼélever, lʼancrer en soi pour qu’elle perdure à travers le temps et demeure inviolable.
La nature, la terre et tout ce quʼelles constituent me renvoient au sacré, car cʼest dʼelles dont nous sommes issus, et dʼelles nous vivons.
Ma conception du sacré est peut-être primaire, mais je crois que cela peut être une expérience propre à chacun.
Il y a peut-être une part psychanalytique dans cette démarche, mais je ne fais pas dʼimage pour l’image ni pour plaire ; elle sʼimpose par une narration intérieure au sein du territoire. Chaque image est un poème, et chaque texte, lorsque j’en ajoute est une image ; un dialogue peut sʼinstaller, comme une tentative de réappropriation de lʼinstant et du monde, comme toujours.
Dans ma démarche photographique, il y a je crois une forme de sacralisation de quelque chose, lʼintention et lʼacte en eux-mêmes en témoignent.
Saisir, décrire, vivre une émotion forte, la traduire, cʼest lʼextraire et lʼélever, lʼancrer en soi pour qu’elle perdure à travers le temps et demeure inviolable.
La nature, la terre et tout ce quʼelles constituent me renvoient au sacré, car cʼest dʼelles dont nous sommes issus, et dʼelles nous vivons.
Ma conception du sacré est peut-être primaire, mais je crois que cela peut être une expérience propre à chacun.
Parcourir, se nourrir
Au lycée Laetitia, à Ajaccio, jʼai eu la chance dʼavoir comme professeur dʼArts plastiques Jean-Laurent Albertini. Cet enseignant originaire du Niolu a bouleversé ma vision du monde. De ces heures de cours avec lui, je garde le souvenir dʼun grand voyage dans le domaine du sensible et de la compréhension du vivant. Il témoignait dʼun profond attachement à sa terre et parlait souvent de son amour pour la nature, la géographie des lieux, et de cette question de la trace comme sujet intime et sacré dans le processus créatif.
En ce qui concerne la photo, c’est enfant, chez mon grand-père, que je me souviens avoir passé de longs moments à observer les noir et blanc de mon oncle qui étaient accrochés dans le couloir : des paysages de forêts, de montagnes, du port de Bastia, des silhouettes sur la mer. Il y avait un mystère qui se dessinait à travers ces clairs-obscurs. Elles nʼont pas forcément conditionné ma pratique actuelle, mais elles ont ouvert une porte, celle de lʼimage et surtout de la représentation.
Jʼai commencé par le dessin et la peinture, et puis progressivement, avec des jetables en noir et blanc, je me suis initiée à la photographie. Jʼai poursuivi cette pratique à l’Université, à Corte, avec un vieux Canon argentique - toujours en ma possession - où jʼai découvert la magie de la chambre noire et des bains révélateurs, véritables expériences dʼalchimiste. Jʼalterne aujourdʼhui entre pratique du numérique et argentique et y associe parfois le collage.
Si je devais citer quelques inspirations, j’évoquerais les photographes Paolo Nozolino, pour ses paysages torturés et ses obscurs portraits charbonneux fascinants, et Mario Giacomelli, pour sa dureté et ses forts contrastes, un homme obsédé par le rapport des Hommes à la terre, menant parfois à lʼirréel et à lʼabstraction la plus totale. Mais aussi la gravure de Dürer, les écrivains comme Gaston Bachelard, véritable ode à lʼexpérience du monde matériel, les poèmes de Dylan Thomas, lʼéternelle mélancolie de Fernando Pessoa. Jʼai globalement une affinité particulière avec les représentations de lʼerrance et le romantisme baudelairien, la monochromie et le clair-obscur, qui installent une dualité du monde.
« Tu marches, tel celui qui ne peut sʼarracher au seuil de sa maison » Cesare Pavese.